Agencement des caractères d'écriture, styles et familles de polices, supports et historique : Canva vous apprend tout de la typographie. Ce guide complet vous aidera à comprendre et trouver les typographies qui vous conviendront le mieux.
À l’heure du numérique, il est communément admis que la typographie est une composante essentielle de toute communication visuelle. Aussi importante d’ailleurs, que la photographie ou l’illustration. Les polices de caractères servent — selon leurs agencements — à faire passer différents messages.
Tout d’abord, une mise en contexte s’impose. On parle aujourd’hui de « typographie » pour désigner autant une police de caractères, que les règles de composition qu’on y applique. La « typo », les « règles typos »... des expressions fourre-tout qui méritent d’être affinées. Comment faire le tri ? Canva se propose de répondre à ces questions en vous offrant, une bonne fois pour toutes, un guide référence de la typographie !
La typographie concerne donc majoritairement le maniement des lettres, et le sens qu’on peut leur donner. Or, il est bon de s’interroger sur la provenance de ces lettres, et par extension, des alphabets.
Les systèmes de caractères dits « modernes », tel que celui présent en Europe de l’Ouest — l’alphabet latin — utilisent des signes, les lettres, qui configurent les sons dont nous nous servons pour nous exprimer. Ces sons portent un nom bien spécifique : il s’agit des phonèmes.
Ce découpage en unités sonores fut théorisé au début du XXe siècle par le linguiste polonais Jan Niecisław Baudouin de Courtenay.
Les phonèmes peuvent varier fortement d’un idiome à l’autre ; nous avons par exemple 36 phonèmes classiques du français : 16 voyelles, 3 semi-consonnes/voyelles et 17 consonnes.
Cette configuration sera différente selon les langues, même celles utilisant un alphabet commun : il n’y a pas un nombre équivalent de phonèmes pour l’espagnol, l'allemand ou l’italien.
Cette relation directe entre oral et écrit nous semble aujourd’hui être une évidence. Il n’en a bien entendu pas toujours été ainsi.
Les premiers systèmes d’écriture étaient de type pictographique ou idéographique. Les signes les composant représentaient des notions, des idées, voire des objets de manière figurative. L’exemple le plus frappant, et sans doute le plus connu, nous vient des Égyptiens de l’Antiquité. Qui n’a en effet jamais entendu parler des hiéroglyphes ?
Il faudra attendre le 10e siècle av. J.-C. pour voir apparaître les bases d’un système de communication consonantique avec l’alphabet phénicien.
En 2006, l’historienne française et chercheuse au CNRS Françoise Briquel-Chatonnet proposait ce schéma, parfait pour comprendre l’évolution des écritures alphabétiques :
Si le terme « typographie » fait référence à l’agencement des caractères d’écriture, il a historiquement plusieurs sens associés et complémentaires.
On peut en effet affirmer sans trop se tromper que la création de la typographie est indissociable de l’invention de l’imprimerie. C’est en Europe, au 15e siècle que l’utilisation de la presse à caractères mobiles (que l’on doit au célèbre Gutenberg) se développe et se démocratise.
Véritables petites corporations, les ateliers emploient des maîtres et compagnons imprimeurs aux tâches bien définies : le « prote », chef d’équipe conçoit et dessine les caractères. L’ouvrier fondeur les moule dans un alliage de plomb, tandis que le « singe », spécialisé dans la mise en page, dispose ces mêmes caractères sur sa grille pour former le texte destiné à être imprimé. Enfin, le compagnon chargé de la lourde presse à bras (l’ours) s’assure de la bonne réalisation de la page en cours.
À la lumière de ces explications, on comprend que la « typographie » désigne historiquement :
Attention toutefois à ne pas confondre la typographie, qui désigne l’utilisation de lettres déjà formées dans le cadre d’une technique particulière (imprimerie, PAO…) avec la calligraphie ou le lettering (tracés manuels de lettres dans un but esthétique).
En s’affranchissant des contraintes techniques de la réalisation des caractères en plomb, le nombre de polices a considérablement augmenté. À l’heure du numérique, il en existe des milliers, toutes différentes.
Chaque police a une personnalité propre et correspond à un usage, une mode ou une époque définie. Il s’agit donc de trouver celles qui vous correspondent le mieux et qui sauront séduire votre public. Pour cela, il est important de reconnaître et identifier les résonances émotionnelles de chaque police. Nous vous aidons à y voir plus clair.
On indique la taille d’une police par son corps, c’est-à-dire sa hauteur. Le corps peut être exprimé en plusieurs unités : ses dimensions en mm, ainsi qu’en points, une mesure exclusive aux polices de caractères. En Europe, l’étalon le plus répandu est le point didot, hérité de l’imprimerie. Cette mesure fut édictée au 18e siècle afin d’uniformiser de créer une norme standard pour les lettres en plomb, et ainsi faciliter la compatibilité et les échanges de matériels. Le point correspond à une fraction de mm (environ 3/8ème) ; sachant qu’un mètre contient 2660 points didot, un texte d’un corps de 12 points didot aura donc une hauteur de 4,51 mm.
Aujourd’hui, les logiciels de PAO préfèrent l’utilisation du point pica comme unité de mesure. Ce dernier ne se base pas sur une fraction du système métrique, mais se rapproche des normes anglo-saxonnes. Ainsi, pour reprendre notre exemple précédent, un texte de corps 12 points pica aura pour hauteur 4,22 mm.
La graisse correspond tout simplement à l’épaisseur du trait d’une police. Chacune d’entre elles comporte généralement plusieurs graisses et pourra être grossie, ou affinée selon son utilisation. Une information à mettre en valeur dans un corps de texte sera plutôt écrite dans une graisse importante (bold, ou black), alors qu’on optera plutôt pour une graisse légère pour donner une impression d’élégance et de raffinement (thin, ou light, par exemple).
On voit souvent les termes « fonte » et « police » utilisés sans distinction. Il existe cependant une nuance importante : on parlera de police pour désigner toutes les tailles et graisses possibles d’une même famille. En revanche la fonte désigne précisément des caractéristiques de corps, graisse et italique pour une police donnée. Il vous appartient donc de jouer avec tous les paramètres d’une police, afin de l’adapter à votre projet et au message que vous souhaitez faire passer.
Quand on parle de la structure d’une lettre, le terme d’anatomie est loin d’être déplacé. En effet, on retrouve un vocabulaire très lié au corps humain pour décrire avec rigueur les différentes parties qui composent un caractère : œil, panse, corps, ligne de pied ou encore jambage… autant de noms truculents qui correspondent néanmoins à une dichotomie bien précise. La typographe américaine Ilene Strizver vous propose d’effectuer une véritable exploration chirurgicale des caractèresdans cet article (en anglais) pour le site font.com.
Si la langue de Shakespeare vous rebute, vous trouverez ci-dessous deux schémas créés par le studio graphique strasbourgeois nůn qui résument avec pédagogie et efficacité l’anatomie d’une police de caractères :
Il est maintenant temps de s’intéresser de plus près aux grandes familles de polices de caractères. Plus qu’un simple système de classement, ces catégories ont une utilité bien réelle. À notre époque, les fonderies ne sont plus physiques, mais numériques. Par conséquent, le nombre de fontes a énormément augmenté, et il peut parfois être difficile de faire le tri, ou simplement de choisir la bonne typographie en fonction de son projet. C’est au moment de processus de détermination que les familles de caractères trouvent toute leur utilité. Elles permettent en effet de sélectionner rapidement des polices ayant un style commun, et ainsi de les inclure en fonction de ces styles dans votre projet. Il existe plusieurs manières de classer les fontes mais nous allons voir les plus courantes : la classification Thibaudeau, et la classification Vox Atypi.
Fruit du travail du grand typographe français Francis Thibaudeau, cette première tentative rationnelle de classement des polices de caractères propose 4 familles, ayant chacune un type d’empattement différent. Simple à appréhender, c’est le médium parfait pour s’initier aux familles typographiques :
Yelle regroupe les typographies à empattement triangulaire, créée par les typographes hollandais Elzevier. Assez reconnaissables, car simples et impactantes, elles comptent dans leurs rangs l’universellement connue Times. Parfaites pour des textes denses et importants. On peut également citer : Garamond, Baskerville, Palatino, Caslon, Minion…
Cette catégorie — nommée d’après la dynastie d’imprimeurs-typographes français du même nom — correspond aux typographies à fort contraste entre les pleins et les déliés. Ces derniers sont parfois très fins, ce qui peut rendre la lecture de ces caractères ardue. Surtout s’ils sont imprimés en petit. On préférera donc utiliser ces polices pour une impression en grand. Élégantes et travaillées, elles sont synonymes de luxe, de raffinement et sont employées dans de nombreux magazines de mode. Vogue, notamment, célèbre pour la qualité de sa maquette. Quelques exemples : Didot, Walbaum, Bodoni…
Elles regroupent les typographies à empattements rectangulaires. Apparues au 18e siècle en Angleterre — suite à un regain d’intérêt pour les graphies de l’Antiquité — ces polices sont souvent utilisées en fontes très grasses, pour la réclame et la création de messages publicitaires. Visibles de loin, elles sont indissociables de l’imagerie de la Conquête de l’Ouest américain. Le fameux « WANTED » figurant sur les avis de recherche des criminels était en effet imprimé en Clarendon. Ses représentantes les plus connues sont : Clarendon, Courier (et tout spécialement le Courier gras), Memphis, Prestige Elite, Rockwell, Officina…
Cette famille regroupe les typographies sans empattements. Claires, nettes et sans fioritures particulières, ces fontes sont les plus simples à appréhender, car les plus aisées à déchiffrer. Dès lors, elles sont parfaites pour la création de titres, sous-titres et chapeau lisibles de loin. On peut citer : Helvetica, Futura, Arial, Meta, Akzidenz Grotesk, Gill Sans, Univers, DIN, Avant Garde...
Ayant supplanté le classement Thibaudeau, la classification Vox — du nom de son créateur Maximilien Vox — a été adoptée en 1962 par l’Association typographique internationale (ATypI) comme norme standard. Elle permet une répartition plus précise des polices de caractères ; il y a à présent 10 grandes familles typographiques.
Les Mécanes
Vous savez désormais l'essentiel de ce qu'il y a à savoir sur la typographie :-). De ses origines, aux recoins les plus intimes de son anatomie, cette discipline n'a presque plus de secrets pour vous. Vous pouvez également apprendre à combiner élégamment des polices de caractères, ou profiter de nos sélections de typos tendances ici, ou là.
Il est toujours possible de s'amuser avec ta typographie ; que vous décidiez de troller un collègue adepte de la tristement célèbre Comic Sans avec le site comicsanscriminal.com, ou que vous cherchiez la fonte du titre de votre film favori, les possibilités sont infinies !
Les webdesigners préfèreront rechercher des associations de web-fonts audacieuses, d'autres préfèreront se plonger dans des infographies didactiques, ou encore se confronter à de très denses bibles typographiques en ligne, comme celle du CRN(s’ouvre dans un nouvel onglet ou une nouvelle fenêtre).
→ La découverte de la typo et de ses applications n'a jamais vraiment de fin car c'est un domaine en constante évolution. À vous d'en comprendre les enjeux, de les appliquer à vos projets... et de foncer !
Rédigé par
Baptiste Dret